Une guerre scolaire en oeuvre
Philippe Champy publie aux Editions La Découverte ce qui me semble être un livre important. C’est en tout cas selon moi la première critique structurée de l’ère Blanquer qui répond à une question fondamentale : où va l’école ?
Une guerre scolaire serait à l’œuvre entre des technocrates dopés à la neuroscience et le monde de l’Éducation !
La politique de JM Blanquer me semble être contestée plus que jamais en cette rentrée 2019. L’épreuve de force du dernier bac passée, l’opinion semble pour le moins partagée. Du moins « la magie » semble ne plus opérer : le sauveur des premiers temps a du plomb dans l’aile à l’image du pouvoir macronien. Mais il déroule quand même son programme inexorablement.
La vraie question qui vaille alors est de savoir si nos libertés sont véritablement en danger. Et là je dois dire que je ne suis pas entièrement convaincu par les arguments déployés. D’abord parce que je pense que supprimer des libertés n’est pas une politique facile et durable dans le temps. Tous ceux qui s’y essayent se cassent un jour les dents. Le grand méchant pouvoir qui cherche à museler tout un pays et les enseignants en premier lieu, c’est faire peu de cas de la capacité de résistance et d’intelligence de toute une population. Les pires régimes dictatoriaux n’éteignent jamais la véritable liberté, celle qui se gagne au péril de quelque chose, accessoirement de son confort ou de sa vie.
Liberté pédagogique, que de crimes on commet en ton nom !
Une telle formule résume bien toute la question : peut-on tout faire au nom de cette liberté, y compris les pires aveuglements doctrinaires et sinon commencer y à porter atteinte ne revient-il pas à mettre le doigt dans un engrenage toujours plus liberticide ?
La réponse me semble dans un subtil équilibre toujours fragile. Et surtout dans un réel pluralisme des systèmes éducatifs. Pluralisme qui n’existe d’ailleurs pas dans la majorité des cas puisque la totalité ou presque des élèves est scolarisée dans un établissement « sous-contrat » avec l’État. C’est précisément ce contrat qu’il convient de refonder. Bizarrement, je n’ai entendu personne dénoncer la mise en péril de la liberté éducative avec l’obligation de la maternelle à trois ans. Les menaces qu’on sous-entend à peine sur les parents qui refuseraient ce diktat ministériel ne posent pas de graves problèmes aux défenseurs patentés de la liberté pédagogique, qui est en premier lieu celle des PARENTS avant d’être celle des enseignants.
Le sort des personnel enseignants est on ne peut plus respectable, mais élèves et parents d’élèves ne me semblent pas être mis au cœur de cette guerre scolaire. C’est là ma critique.
Un très beau livre, passionnant ne serait-ce que pour sa partie consacrée à l’édition scolaire. Pour un ancien responsable de Retz on n’en attendait pas moins. Un livre qui fera date par sa qualité pour donner de quoi s’opposer à la politique de JM Blanquer et qui plaira au monde enseignant. Un livre qui me semble être fait pour durer au delà de la simple publication d’un nième livre sur le thème de l’éducation qu’on assassine. Je n’avais lu aucune analyse aussi pertinente du monde de l’édition scolaire à l’heure du numérique.
Je pense cependant qu’on assiste à une transformation irrémédiable du rôle de l’enseignant : la guerre scolaire n’est pas seulement entre des gentils enseignants et des méchants GAFA, il l’est tout autant entre quelques stars professeurs/blogueurs/youtubeurs – producteurs de contenus pour faire simple – et toute une piétaille d’enseignants qui sont bien heureux de trouver soit gratuitement sur le Web -soit chez des maisons d’éditions comme Retz – des ouvrages qui vont au quotidien leur permettre de tenir une classe. La vraie liberté pédagogique commence aussi par du personnel qui ne va pas de remplacement en remplacement découvrir des classes multiples dans des locaux modulaires.
Philippe Champy : « De nouveaux acteurs externes au système et très influents » https://t.co/Co8eHmb1FQ via @humanite_fr
— Mesenfantsautop (@mesenfantsautop) September 1, 2019
Quelques extraits du livre chez un GAFA (sic)